Le paradoxe de la troisième République telle que consacrée par la Constitution du 18 février 2006 de la République Démocratique du Congo tient à ce que, d’un côté, l’avènement de la démocratie est salué, et de l’autre, la légitimité du Parlement, institution pivot de la démocratie, est amèrement décriée, depuis déjà trois législatures.

Les citoyens se demandent si les processus politiques actuels sont réellement en mesure de produire des parlements représentatifs de leurs intérêts dans toute leur diversité.

Dès lors, qu’entendons-nous véritablement par parlement démocratique ? Au mieux, quel est l’apport d’un Parlement dans la construction de la démocratie ? Autrement dit, quel est l’apport des Assemblées délibérantes à la démocratie ? Quels sont les attributs qui font d’un Parlement une instance démocratique ? Comment le rendre encore plus démocratique ?

Telles sont les questions auxquelles le présent Cahier s’efforce de répondre. Les auteurs y relèvent quelques défis face aux tâches essentielles du Parlement dans une démocratie. Ils y montrent ce qu’implique pour une assemblée délibérante la volonté d’être authentiquement représentative, transparente, accessible, responsable devant les citoyens et efficace dans ses nombreuses fonctions.

La présente revue nommée « Cahier du Parlement » analyse ces questions :

Le premier article (1) offre aux protagonistes de l’action publique en République Démocratique du Congo les possibilités innovantes de la légistique dépassant les limites juridiques et rédactionnelles habituelles. Aussi, plaide-t-elle pour la démocratisation de la légistique au- delà des assemblées délibérantes et des exécutifs la démocratisation de la légistique dans les Assemblées délibérantes et le Parlement congolais (Germain Mbav Yav) ;

Le deuxième article (2) questionne les effets de la loi n°15/025 du 31 décembre 2015 relative aux baux à loyer non professionnel. En évaluant l’effectivité et la faisabilité de la loi, l’auteur analyse la dimension participative de la cible concernée par la loi dans sa conception et sa mise en œuvre(David Mukulu) ;

Le troisième article (3) questionne les motivations réelles qui se cachent derrière les propositions de lois au Parlement. L’auteur part du constat selon lequel les élus nationaux initient assez souvent des propositions de lois qui ne reflètent nullement la volonté de ceux qu’ils sont censés représentés. Le culte du moi prôné par les élus les amène à faire passer avant tout leurs intérêts au-devant de ceux du peuple. Cette étude s’inscrit dans le critère de responsabilité des élus d’un Parlement démocratique (Yves Mikombe) ;

Le quatrième article (4) analyse les modalités de contrôle parlementaire telles que formalisées dans les textes de loi et telles que pratiquées. Il relève les difficultés auxquelles bute le peuple – plus particulièrement la société civile- en exerçant un contrôle sur les activités parlementaires. Il démontre sans aucune prétention négative que, ce paradoxe est lié au comportement irresponsable d’acteurs politiques qui constituent un réseau et laboratoire politique visant les intérêts égoïstes pour déstabiliser l’appareil étatique (Danilo Kibatondo) ;

Le cinquième article (5) analyse le but caché des motions intempestivement initiées par les députés provinciaux à l’encontre des gouverneurs de province. Alors que le gouverneur est censé être déchu de ses fonctions par la procédure de motion initiée par l’Assemblée provinciale de son ressort, les députés provinciaux font d’elles une arme de chantage au gouverneur (Prince-Bernard Mudianji) ;

Le sixième article (6) fait une lecture formalisée sur les modes d’accès aux fonctions législatives provinciales. L’auteur estime que l’institutionnalisation de la cooptation comme mode d’accès aux fonctions de député provincial au côté de l’élection offre une perception bicéphale : l’expression d’une législation favorisant une démocratie soumise aux principes majeurs régissant tout État de droit d’une part, et le symbole d’une législation protectrice des coutumes locales d’autre part. C’est de cette appréhension que naît le besoin de se prononcer sur la comptabilité de la législation congolaise en cette matière.

Cette étude s’inscrit dans le critère de la redevabilité des élus « rendre des comptes » et de

l’efficacité d’un Parlement démocratique (Hervé Ngulu) ;

Le septième article (7) analyse la disposition de la loi électorale de la République démocratique du Congo sur la rétention de la liste d’un parti, groupement ou formation politique au répondant du seuil de recevabilité au prorata de 60% de sièges en compétition. Il questionne le profil du candidat en se référant aux manœuvres observées lors du processus de recrutement dans le but de respecter les dispositions légales (Anicet Senker) ;

Le huitième article (8) examine le régime disciplinaire de l’Assemblée provinciale du Kasaï- Oriental (Une des provinces de la République Démocratique du Congo) dans sa dimension éthique et déontologique. L’auteur fait une étude croisée entre les bavures posées par les députés de cette assemblée délibérante et le règlement intérieur qui les régit, et questionne par la suite l’efficacité de ce régime. (Olivier Kashala).

Philibert Kanika Sumbayi

Directeur Général de l’Institut Supérieur d’Études Parlementaires